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Chroniques vingt-et-unièmes — La vérité historique — 31 juillet 2023

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  La vérité historique   —  On y est, J – 365, l’atmosphère devient fébrile… Thomas sert un jus d’orange à Marcus. Enfoncé dans un fauteuil, celui-ci aimerait se laisser couler dans un petit sommeil, mais il sent un besoin de parler de la part de son fils. À l’extérieur, les averses se succèdent et même si elles ne rechargent pas les nappes phréatiques, comme il est usuel de l’entendre, c’est autant qui n’est pas puisé par les agriculteurs. —  Les Jeux de Paris ? réagit Marcus. C’est vrai, on s’en rapproche. Usain Bolt a même fait le déplacement pour l’occasion. Il sera présent à la cérémonie d’ouverture en 2024 et se dit très content. Dans la mesure où l’athlétisme ne commence qu’à la deuxième semaine, il n’a pas eu souvent dans le passé la possibilité d’assister au spectacle initial… Thomas regarde fixement son père. —  Les Jeux olympiques nous paraissent une évidence aujourd’hui. Ce fut loin d’être toujours le cas… —  Ah oui ? Nous y voilà. Ce n’est pas pour rien que Thomas a choisi

Chroniques vingt-et-unièmes — Besoin de moralistes ? — 24 juillet 2023

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  Besoin de moralistes ?   Giliano Da Empoli ne l’avait pas envisagé. Il n’est pas allé jusqu’à prévoir la rébellion de Prigogine, celui qu’il appelle affectueusement « Genia » dans son livre. Mais nul n’est devin.  Kevin déambule parmi les dunes. Il a apprécié le roman. Style alerte qui coule agréablement, et une façon originale de brosser un tableau de l’histoire de la Russie depuis l’accession au pouvoir de Vladimir Poutine, celui qui n’est pas un « Tsar », du moins pas encore, mais en porte tous les atours. Le Mage du Kremlin . Il se demande s’il doit présenter l’ouvrage à la session de rentrée du Liber Circulo . Car il doit plancher à nouveau après avoir commenté La Recherche de Marcel Proust en fin d’année dernière. Deux exercices en une année seulement ! Une sorte de bizutage du club qu’il vient d’intégrer, à moins qu’il ne s’agisse d’une affection particulière que développe pour lui le professeur Marcus en raison de son agrégation de lettres classiques. Il choisit un banc cer

Chroniques vingt-et-unièmes — L’inverse serait un oxymore — 17 juillet 2023

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  L’inverse serait un oxymore   Le professeur Marcus repose l’article. L’hydrogène blanc, faut-il y croire ? Et d’abord qu’est-ce que c’est ?  L’aventure a commencé au Mali dans les années 2010, non loin de Bamako. Des villageois creusent un trou pour puiser de l’eau dans la nappe phréatique. Ils creusent profondément, pas moins de cent mètres, et là, surprise ! Car, harassé, l’un des ouvriers a ressenti le besoin d’une cigarette. Il l’allume et c’est la déflagration. On s’interroge. Quelle est la cause de l’explosion ? Après analyse, on constate que de l’hydrogène pur s’échappe du forage. Des tonnes et des tonnes d’hydrogène qui ne demandent qu’à être récupérées. Et c’est ce qu’on va faire. Un complexe est construit pour exploiter la précieuse marchandise. Il va être suivi de beaucoup d’autres dans différentes régions du monde, comme au Nebraska. Et ailleurs, on prospecte. En Islande, en Australie, au Brésil, et même en France.  Mais pourquoi un tel engouement ? Parce que l’hydrogène,

Chroniques vingt-et-unièmes — Trouver la solution — 10 juillet 2023

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  Trouver la solution  —  Fort, le café ? —  Bien fort, tu le sais bien… Didier, le père de Jean-Bernard, est venu séjourner quelques jours à la maison en ce début d’été. Un orage a traversé la nuit ; il en reste, devant la salle à manger, une terrasse étincelante qui vibre sous les rayons matinaux. Didier saisit la tasse que lui tend son fils et semble dire pour lui-même : —  Je n’ai pas envie de voir des feux d’artifice cette année… —  Parce que tu en as vu suffisamment ? Tu penses aux émeutes ? Jean-Bernard sourit. Quelle que soit la gravité des circonstances, son père garde toujours le sens de l’humour, mais jusqu’à un certain point. —  Oui, les émeutes. Je vais passer pour un vieux réac, mais de mon temps, les enfants, on les tenait ! On devrait supprimer les feux d’artifice cette année et se servir de l’argent économisé pour dédommager les commerçants ! Tenir les enfants… Pour Jean-Bernard, les choses ne sont pas si simples, il attribue la situation à un autre phénomène. Il a bea

Chroniques vingt-et-unièmes — Un pouvoir d’attraction — 3 juillet 2023

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  Un pouvoir d’attraction  —  On a parlé rébellion en Russie, et maintenant plus rien… Ce sont les émeutes urbaines qui occupent toute l’actualité. Pour l’instant. Mais je ne veux pas me laisser influencer… Lors de notre dernière rencontre, tu nous as bien dit que Poutine était un agent de l’étranger ? —  J’espère que vous ne m’avez pas cru ! sourit Jean-Bernard en humant son café-crème. Il est 8 heures du matin, Jean-Bernard, Charles et Ludovic ont préféré échapper à la chaleur en se rendant très tôt au bistrot du Trocadéro. Leur « cercle militaire informel » reprend un peu de couleurs, quelques habitués discutent au comptoir, eux ont choisi le fond de la salle, comme d’habitude. —  Presque… poursuit Ludovic. Et tu ne penses pas plutôt que c’est Prigogine… ? Jean-Bernard fait mine de réfléchir : —  Drôle d’histoire… Certains prétendent que c’est un coup monté. Mais je me demande qui est le gagnant dans cette histoire. Prigogine se voit exilé en Biélorussie et on ne peut pas dire que P

Chroniques vingt-et-unièmes — Le résultat de la bipédie ? — 26 juin 2023

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  Le résultat de la bipédie ? Sa mort ne date que d’un an. On ne peut pas dire, à part quelques entrefilets dans la presse du 22 juin 2022, que sa disparition ait laissé une grande trace dans l’actualité. Certainement moins en tout cas que ces auteurs de « vidéos virales » qui déclenchent des millions de vues sur les réseaux sociaux. Il en est ainsi de la digitalisation du monde où la primauté de l’instant étouffe toute autre considération.   En ce qui concerne Yves Coppens, trop d’événements, comme d’habitude, occultaient l’information. Mais dans son paradis anthropologique, il a peut-être rejoint Lucy dans un univers qui n’appartient qu’à eux. Et dans un avenir proche, il apparaîtra sûrement aussi étrange que les spécimens qu’il a exhumés, porteur d’une force intranquille qui le poussait à savoir. Cela fait donc un an. En arpentant la Grande Galerie de l’Évolution du Jardin des Plantes, Benoît y pense. Il marche d’un pas si naturel que nul ne peut se douter qu’il a fallu des millions

Chroniques vingt-et-unièmes — Un rêve étrange — 19 juin 2023

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  Un rêve étrange —  J’ai fait un rêve étrange… Xavier s’est étiré en prononçant ces paroles. Émeline qui prépare le café relève la tête. —  I have a dream ? —  Pas vraiment… Ça se passait ici, en France, et je réfléchissais. —  Tu réfléchis déjà toute la journée, et la nuit, tu réfléchis encore ! —  Oui, oui, c’est comme ça… Donc, dans mon rêve, je réfléchissais à l’économie française, à ce qui la fait tourner. Elle est intéressante cette question, non ? —  Si tu veux… (Émeline hausse les épaules.) —  C’était une situation bizarre. Je constatais que 90 % de la production industrielle était assurée par des machines, et que toutes les tâches manuelles qui ne pouvaient pas être automatisées, dans les usines ou ailleurs, étaient remplies par des migrants. Et du côté des tâches intellectuelles, c'était pire, les intelligences artificielles se chargeaient de tout. Alors, j’avais une interrogation… —  Oui, quelle interrogation ? —  Cette interrogation, c’était : « Mais où sont passés les

Chroniques vingt-et-unièmes — Grande et bronzée et jeune et belle — 12 juin 2023

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  Grande et bronzée et jeune et belle Quentin scrolle sur son smartphone.  De toute la force de son pouce, il scrolle. Et quatre syllabes attirent son regard : I-PA-NE-MA. La fille d’Ipanema n’est plus. Ou plutôt celle qui en interprétait la chanson en anglais, Astrud Gilberto, qui remporta avec ce tube un succès mondial en 1964. Quentin n’a jamais été un fan de la bossa nova , c’est une question de génération, mais il sait que son grand-père Didier adore cette chanson. Il se souvient de lui quand il en marquait le rythme de son pas chaloupé, en ignorant cependant que derrière ce titre se cache toute une histoire.  Ipanema, c’est ce quartier huppé de Rio de Janeiro qui se prolonge, devant les gratte-ciel, sous la présence rassurante au loin du Pain de Sucre et du Christ Rédempteur, d’une étendue de sable blond où touristes et Cariocas se précipitent. Nous sommes en 1962, Vinicius de Moraes et Antonio Carlos Jobim, auteur et compositeur, aiment y consacrer leurs après-midi, s’installent