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Affichage des articles du février, 2022

Chroniques vingt-et-unièmes — Le soleil se couche à l’est — 28 février 2022

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  Le soleil se couche à l’est C’est une sorte de club pour officiers en retraite de l’armée de terre, on s’y conduit comme au mess, en cultivant une certaine nostalgie. Jean-Bernard y retrouve tous les trois mois Ludovic et Charles, et c’est un bistrot près de la place du Trocadéro qui fait office de quartier général. En quittant son domicile, il a éteint la télé d’un geste sec. C’était le trop-plein. L’Ukraine, l’Ukraine, l’Ukraine… Toute la semaine, BFM , CNews , LCI , France Info ont pratiquement ignoré les autres actualités. Et aujourd’hui, l’affaire a pris une nouvelle ampleur. Des paroles, on est passé aux actes. Aussi, il ne manifeste pas d’étonnement, lorsqu’il approche, à surprendre ses deux amis entraînés dans une discussion assez houleuse. Et c’est Ludovic qui la mène :  —  Je t’en prie, essaie de te mettre, ne serait-ce que cinq minutes, dans la tête de Poutine… —  Ça va être difficile ! —  Essaie. Avec de la volonté, on y arrive. Je rappelle d’abord un fait historique :

Chroniques vingt-et-unièmes — À l’avenir de décider — 21 février 2022

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  À l’avenir de décider Ludivine soupire. Elle déplore toutes ces bisbilles, sur un sujet aussi grave, entre les deux collectifs féministes #NousToutes et Féminicides par compagnons ou ex . Le premier reproche au second des propos « transphobes » et ne veut plus relayer le décompte des féminicides conjugaux que celui-ci assure depuis 2016. L’une de ses membres a ajouté : « Nous avions en tête de travailler sur une définition plus inclusive, plus large du féminicide, pour rendre visible la violence systémique à l’égard des femmes. C’est un continuum de violences ».  —  Du charabia, de la novlangue à l’état pur, a estimé Xavier après avoir entendu une conversation entre sa fille et Émeline. Je doute qu’on puisse poster un gendarme derrière chaque couple, même avec la meilleure volonté du monde… Et devant l’amplification de ce phénomène, il se demande si le fait d’en parler constamment dans les médias ne contribue pas à son expansion, comme un effet de mode, comme une menace palpable que

Chroniques vingt-et-unièmes — Divaguer, c’est réfléchir — 14 février 2022

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  Divaguer, c’est réfléchir Le chaos en Libye et en Somalie ; la guerre civile en Éthiopie et en Centrafrique ; des coups d’État au Mali, au Burkina Faso, au Soudan ; un quasi-coup d’État en Tunisie ; des tentatives de coup d’État en Guinée-Bissau et au Niger ; la dictature en Érythrée ; un régime autoritaire en Égypte, en Angola et au Congo-Brazzaville ; un gouvernement militaire au Tchad ; une insurrection salafiste au Nigéria ; une insurrection tout court au Gabon ; des menaces et des attaques djihadistes en Mauritanie, au Mali, au Niger, au Bénin, au Burkina Faso, au Kenya et au Mozambique ; un conflit larvé avec les indépendantistes de Casamance au Sénégal ; des visées séparatistes au Cameroun ;  des troubles au Swaziland ; l’instabilité en Gambie, au Burundi, en Côte d’Ivo ire et à Madagascar ; la rupture des relations diplomatiques entre l’Algérie et le Maroc ; des inégalités records et la prévarication à répétition en Afrique du Sud ; la corruption généralisée et des groupes ar

Chroniques vingt-et-unièmes — La tyrannie de l’immédiat — 7 février 2022

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  La tyrannie de l’immédiat Le professeur Marcus n’a que l’embarras du choix pour la prochaine séance du Liber Circulo , le cercle de lecture qu’il préside. Pierre Lemaître, Nicolas Mathieu, Éric Vuillard, Leïla Slimani, Michel Houellebecq, tous ex-lauréats du Goncourt, semblent s’être donné le mot pour la rentrée littéraire de janvier. Fort de la notoriété apportée par le célèbre prix, chacun poursuit son œuvre à sa manière, dans un genre très différent. Ces cinq-là, Marcus les considère au-dessus de la mêlée, ils émergent d’un flot qui ne cesse de grossir.  Car cette rentrée a été prolifique. Avec le confinement, les auteurs établis ont disposé de plus de temps, mais les auteurs en herbe tout autant. C’est ce qui explique pourquoi les éditeurs croulent sous les premiers romans. Certains ont d’ailleurs fermé provisoirement leur porte, éreintés par l’afflux. Un véritable coup dur pour tous ceux qui pensaient voir leur rêve s’affirmer en réalité. Marcus estime que tout cela s’inscrit da

Chroniques vingt-et-unièmes — Rouvrir la parenthèse — 31 janvier 2022

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  Rouvrir la parenthèse Le bâtiment élève sa haute structure ailée sous un ciel pur, déjà teinté de l’ocre du couchant. Émeline vient de parcourir pendant deux heures les salles qui abritent la collection présentée par la fondation. De l’une à l’autre, des Sisley, des Manet, des Monet, mais aussi des Renoir, Gauguin, Van Gogh, Matisse, Derain, Cézanne, Bonnard, Denis, Picasso, Rodin, Pissarro, Toulouse-Lautrec, Maillol, Derain, Vlaminck, Marquet… Et puis des Russes : Mackkov, Gontcharova, Sérov, Golovine, Répine, Korovine, Outkine… Cette collection, c’est celle des Morozov, deux frères passionnés par l’art pictural à la charnière des XIX et XXe siècles. Et la fondation Louis Vuitton a choisi de faire revivre cet épisode de l’histoire, de rouvrir une parenthèse fermée précipitamment. Rien ne prédisposait ce nom, Morozov, à sortir de l’oubli dans lequel l’avait plongé la révolution russe. D’abord, qui étaient-ils ? Le plus ancien connu est Savva Vassiliévitch Morozov, né en 1770 sous le