Chroniques vingt-et-unièmes — De la diversité — 28 octobre 2024

 De la diversité 

  —  Je ne veux plus entendre parler de politique !

C’est le cri du cœur lancé par Romane lorsque Xavier  a esquissé une discussion sur le budget de la France. Ils sont réunis tous les quatre au restaurant pour fêter l’anniversaire de Sébastien, lequel fronce les sourcils et fixe son ami, lui faisant comprendre qu’il serait opportun d'aborder un autre sujet, tant il craint les réactions de sa femme.

—  OK, reprend Xavier, pas de politique… Mais la France est tout de même en train d’imploser… Et j’en attribue la cause aux corps intermédiaires…

Romane fait mine de se boucher les oreilles, mais Sébastien est malgré tout intéressé :

—  Tiens donc…

—  Oui, je pense que tout le monde admet qu’il faut quelques sacrifices, la situation actuelle ne peut plus durer.

—  Ça, c’est vrai.

—  Et je pense aussi que les citoyens de base sont d’accord pour les faire ces sacrifices, pourvu que les efforts soient équitablement partagés. À chacun sa part…

—  C’est encore vrai.

Émeline lève des yeux étonnés. Pour une fois que Sébastien et son mari sont du même avis… Mais ce dernier enchaîne :

—  Seulement, il y a les corps intermédiaires. Je veux parler des partis politiques, des syndicats, des associations de défense de ceci ou de cela. Ils sont jusqu’au-boutistes, ils refusent les compromis, ils dressent des « lignes rouges », ils font de la surenchère… Et c’est normal puisqu’ils cherchent à démontrer qu’ils servent à quelque chose, et qu’ils sont chacun en concurrence avec d’autres dans leur domaine : les partis entre eux, les syndicats entre eux, les associations entre elles…

—  Attends, tu prétends qu'on devrait supprimer les corps intermédiaires… !

—  Je ne dis pas ça, mais il faudrait qu’ils se comportent autrement, sinon le risque est de les enjamber et de sombrer dans le bonapartisme. De Gaulle l’a fait en s’adressant directement au peuple, et Macron s’y est essayé au début de son mandat, sans grand succès toutefois…

Sébastien va répondre quand Émeline lui coupe la parole :

—  Allons, détendons-nous…

—  D’accord, approuve Xavier, ne parlons plus de la France. Des États-Unis peut-être… ?

Romane qui achève sa crème brûlée soupire :

—  Ce qui se passe là-bas ne vaut pas mieux qu’en France. Dire que Trump pourrait gagner !

—  Tu serais contre la démocratie ? plaisante aussitôt Xavier.

—  Non, mais…

Émeline voit encore là une source de pugilat. Elle dévie à nouveau la conversation :

—  J’ai lu que Giorgia Meloni veut combattre le lobby LGBT en Italie, elle vient d’ailleurs de prendre des mesures contre la GPA. Un coup dur pour les gays. Mais les lesbiennes sont aussi visées. C’est un endroit où il ne ferait pas bon vivre pour Virginie Despentes qui prophétise que d’ici quelques années toutes les femmes seront lesbiennes…

—  Toutes les femmes des lesbiennes ? s’interroge Romane. Je n’ai rien contre les lesbiennes, mais je préfère quand même la diversité…

Émeline hoche la tête pour marquer son assentiment :

—  Tu as raison, la diversité sous toutes ses formes, y compris dans les couples.

—  Pas facile, pourtant, remarque Xavier. On affirme que la société est homogame, c'est-à-dire qu’on recherche pour former un couple une personne du même milieu social. C’est peut-être vrai, mais en même temps, quand dans un couple, on n’est pas du même milieu social, on parle d’un risque d’emprise… Il faut savoir ce que l’on veut !

—  J'ai l'impression qu’on ne sera pas encore d’accord, lance Romane. Tu ne crois pas que tu mélanges un peu les sujets, là ?

—  Vous n’êtes pas d’accord ? Mais c’est la diversité ! conclut Émeline en commandant des cafés au serveur.

FIN

https://gauthier-dambreville.blogspot.com

https://app.partager.io/publication/gd

Auteur chez L'Harmattan de VarIAtions (IA : le puzzle de notre futur s'assemble)

Gauthier Dambreville - Chroniques vingt-et-unièmes

28 octobre 2024