Chroniques vingt-et-unièmes — Croire au renouveau — 8 avril 2024


 Croire au renouveau


—  Tiens, j’ai revu Un autre monde à la télé. Nous étions allés le voir, Romane et moi, au cinéma en 2021 quand il est sorti, et je le trouve toujours aussi excellent.

—  Oui…

Xavier vient de répondre tout en poussant son fou. Sébastien enchaîne :

—  Un film de Stéphane Brizé avec Vincent Lindon qui joue très bien, comme d’habitude… Brizé, c’est notre Ken Loach à nous. Il avait fait avant La loi du marché avec Vincent Lindon. L’histoire d’un type qui se retrouvait chômeur et acceptait à la fin un emploi d’agent de sécurité…

—  Je m’en rappelle…

—  Avec Un autre monde, Brizé montre tous les ravages du capitalisme, tous ces cadres et ces ouvriers qu’on pressure jusqu’à la moelle dans le seul but d’augmenter les dividendes des actionnaires. C’est ça la morale du film !

—  Oui, les actionnaires, c’est un bon sujet…

—  Il va bien falloir en sortir un jour. Tiens j’ai vu que Gabriel Attal veut « taxer les rentes ».

Xavier hoche la tête, mais on ignore si c’est à cause de sa reine qui est attaquée.

—  Tu vas peut-être un peu vite en besogne : pour l’instant, c’est simplement une commission qui doit émettre des conclusions en juin.

—  D’accord mais ça permettra peut-être de taxer les actionnaires…

—  Ah ! Les actionnaires… Bon sujet…

—  J’ai l’impression qu’il y a une prise de conscience, continue Sébastien avec une lueur dans les yeux. Je me demande si je ne vais pas voter écolo aux prochaines Européennes.

—  Je te croyais plutôt « Insoumis »…

—  Oui, mais je trouve très intéressante la proposition des écolos de créer un fonds européen de 100 milliards d’euros sous l’égide de la BEI qui aurait une participation majoritaire de 51 % dans toutes les entreprises travaillant dans le pétrole et détruisant la planète, Total en premier. Tant pis pour les actionnaires. Comme ça, ils ne feront plus ce qu’ils veulent.

—  Oui, les actionnaires… Bon sujet…

Sébastien fixe durement son ami. Il connaît Xavier, celui-ci a sûrement une idée derrière la tête.

—  Quoi, bon sujet ? Depuis tout à l’heure, tu me dis ça en parlant des actionnaires…

—  Pourquoi ? Je reviens à ton film. Moi, je vois une autre morale à propos d’Un autre monde.

—  Dis toujours…

—  Tu as remarqué que toutes les décisions sont prises ailleurs qu’en France, que c’est un Américain qui les impose…

—  Oui, c’est bien ce que je blâme…

—  Eh bien, explique Xavier, si les actionnaires français n’étaient pas remplacés par des actionnaires étrangers, on n’arriverait pas à ce genre de situation. Mais à force de taxer les « vilains » actionnaires français et de les critiquer, ils en ont un peu marre les vilains actionnaires français ! Ils préfèrent mettre leur argent dans l’immobilier et laisser la place aux fonds d’investissement américains qui ne demandent que ça !

—  Tu vas me faire pleurer, répond Sébastien en levant les yeux au ciel, mais en conservant néanmoins un regard furtif sur son roi menacé par un pion de Xavier.

—  Pourtant le gouvernement et tous les partis d’opposition ne parlent que de retrouver la « souveraineté économique ». Mais pour cela, il faut être propriétaire de ses entreprises. On devrait peut-être réfléchir à ce problème…

—  Il suffit de nationaliser…

—  Ah ! Nationaliser… L’État dans le passé n’a pas fait la démonstration de son efficacité dans la gestion des entreprises nationalisées. Souviens-toi du Crédit lyonnais…

Ils ont terminé sur un Pat. La partie d’échecs n’aura ni vainqueur ni vaincu. Sébastien sent que Xavier est de mauvaise humeur, il préfère aborder un autre sujet :

—  Bon, je n’arriverai pas à te convaincre. On a au moins avancé sur la question du génocide rwandais : Macron a déclaré que la France aurait pu arrêter le génocide, mais n’en a pas eu la volonté.

—  Oui, oui, c’est le discours classique : on ne s’en prend pas à ceux qui on fait le mal mais à ceux qui n’ont pas empêché de le faire. Mais ce qui me gêne le plus dans tout ça, c’est de considérer que les Africains ne sont pas adultes, qu’ils ont toujours besoin d’une main étrangère pour leur dire ce qu’ils ont à faire ou ce qu’ils ne doivent pas faire. C’est même assez méprisant, quand on y pense…

—  Oh là ! Je te trouve bien pessimiste…, s’exclame Sébastien.

—  L’époque n’incite pas à l’optimisme, mais heureusement, c’est le printemps…

—  Tu as raison, il faut croire au renouveau.



FIN


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Gauthier Dambreville - Chroniques vingt-et-unièmes

8 avril 2024

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